Actualités Juridiques

Direction du procès par l’assureur : attention aux exceptions !

L’article L 113-17 du Code des assurances dispose que l’assureur qui prend la direction d’un procès est sensé renoncer à toutes les exceptions dont il avait connaissance lorsqu’il a pris la direction du procès. Mais les exceptions auxquelles l’assureur est censé renoncer ne sont pas toujours clairement définies ! En l’espèce, Monsieur X, assuré auprès de SAGENA, a effectué des travaux de rénovation et d’agrandissement d’un pavillon. Des fissures sont apparues après la réception. La SAGENA a refusé sa garantie dans cette affaire. Elle considérait que les désordres n’étaient pas de nature décennale. Monsieur X conteste cette position, précisant que son assureur ayant pris la direction du procès, il renonçait donc aux exceptions qu’il pouvait opposer à son assuré. La Cour d’Appel de Toulouse, dans son arrêt du 4 septembre 2012 a débouté Monsieur X de sa demande en garantie. Elle considérait qu’il était loisible pour Monsieur X de se faire représenter par un conseil distinct de celui de son propre assureur s’il estimait que cette défense était contraire à ses intérêts. La Cour de cassation casse cet arrêt. Elle précise que l’application de la responsabilité de droit commun en lieu et place de la garantie décennale figure au nombre des exceptions de non garantie auxquelles l’assureur renonce lorsqu’il prend la direction du procès. La Cour d’appel a violé l’article L 113-17 du Code des assurances. Source : Cour de cassation – arrêt du 29 janvier 2014 – 3eme chambre (Pourvoi

Révolution en matière de fausse déclaration du risque ?

La chambre mixte de la Cour de cassation vient de préciser que l’assureur ne peut se prévaloir de fausses déclarations réalisées dans un formulaire pré-rempli. Dans cet arrêt du 7 février 2014, le conducteur d’un véhicule impliqué dans un accident avait souscrit une police d’assurance auprès de la compagnie AVIVA. Or dans les conditions particulières, l’assuré avait mentionné « lu et approuvé » concernant les déclarations suivantes : (l’assuré) – n’a pas fait l’objet au cours des trente-huit derniers mois, d’une suspension de permis de conduire supérieure à deux mois, – ni d’une annulation de permis à la suite d’un accident ou d’une infraction au code de la route. Or, PRECISEMENT le permis de conduire de cet assuré avait pourtant effectivement annulé précédemment par un jugement rendu par le tribunal correctionnel, avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant un an et six mois. Et ceci moins de 38 mois avant l’adhésion à la police d’assurance ! La Cour d’Appel avait donc retenu l’existence d’une fausse déclaration intentionnelle. Pourtant, la chambre criminelle de la Cour de cassation a pour sa part cassé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel d’Aix en Provence, et par suite, la chambre mixte de la Cour de cassation par arrêt du 7 février 2014, s’est rangée à l’avis de la chambre criminelle. Selon la chambre mixte, « Il n’appartient pas à l’assuré, lors de la conclusion du contrat d’assurance, de déclarer spontanément les éléments utiles à l’appréciation du risque couvert, mais qu’il lui incombe seulement de répondre avec exactitude aux questions préalablement posées par l’assureur sur les circonstances permettant de se faire une opinion du risque ; que l’assureur ne peut obtenir la nullité du contrat pour fausse déclaration intentionnelle qu’à la condition de prouver qu’il a, au cours de la phase précontractuelle, interrogé l’assuré sur la circonstance formant l’objet de la fausse déclaration alléguée, et que l’assuré a répondu inexactement à la question posée ; que cette preuve, qui ne saurait résulter des seules mentions figurant aux conditions particulières de la police, doit être rapportée par la production du questionnaire soumis à l’assuré et des réponses apportées par ce dernier ; qu’en l’espèce, la cour d’appel ne pouvait donc pas se fonder sur les seules stipulations des conditions particulières du contrat d’assurance du 21 juin 2006 pour retenir l’existence d’une fausse déclaration intentionnelle de M. Alain X… sur ses antécédents. » Il appartiendra donc à tout assureur de mettre à la disposition de tout candidat un questionnaire à remplir et à signer, en lui posant clairement des questions Ce questionnaire devra comporter des questions précises et dénuées d’ambiguïté. Cet arrêt d’importance pourrait en réalité être rappelé dans nombres de dossiers où l’assureur se prévaut d’une fausse déclaration intentionnelle lors de la souscription du risque ! En effet, par simplification « logistique » les assureurs ont mis en place un système de déclaration pré-remplie. Au final, est-ce à dire qu’après de longs et fastidieux débats sur la question et d’un désaccord ayant opposé vivement les chambres civiles à la chambre criminelle de la cour de cassation, la haute juridiction entend ENFIN imposer clairement son interprétation de l’article L.113-2 du code des assurances ? Il faut attendre avec prudence les prochains arrêts rendus en la matière, mais il s’agit ici d’un coup de semonce d’envergure !  Cour de cassation – chambre mixte – arrêt du 7 février 2014

Les conditions de la réparation du préjudice spécifique d’accompagnement de fin de vie

Dans un arrêt du 21 novembre 2013 (Cass. 2e civ., 21 novembre 2013, n° 12-28168) la Cour de cassation a précisé que le préjudice spécifique d’accompagnement de fin de vie a pour objet d’indemniser les troubles et perturbations dans les conditions d’existence d’un proche qui partageait habituellement une communauté de vie affective et effective avec la victime. Ce critère est appliqué de manière restrictive par la Cour. En effet, la Cour d’Appel de METZ avait pour sa part alloué à la sœur de la victime de violences volontaires en réunion ayant entraîné la mort sans intention de la donner, en sa qualité de représentante légale de ses filles mineures et à son mari la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice d’accompagnement (sommes versées en sus de l’indemnisation pour préjudice moral). Les faits étaient particuliers, car dans cette affaire, étaient versées aux débats des pièces démontrant qu’effectivement durant la période d’hospitalisation subie par la victime, entre la date de l’agression et la date de son décès, cette victime avait été assistée, non seulement par ses parents et sa sœur, mais également par son beau-frère et ses nièces. Tous avaient subi durant cette période des troubles importants dans leurs conditions d’existence en se relayant au chevet de la victime. Une des fillettes très traumatisée par l’état de son oncle puis son décès avait fait l’objet d’un suivi psychologique important et en lien direct. Il était également établi dans cette affaire que l’oncle défunt avait effectivement des liens extrêmement étroits avec sa sœur, son beau-frère et ses enfants. Le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions avait saisi la Cour de cassation, et la deuxième chambre civile de la Haute Cour casse l’arrêt au visa de l’article 706-3 du Code de procédure pénale et du principe de la réparation intégrale, sans perte ni profit pour la victime. La Cour de cassation précise en effet que le préjudice spécifique d’accompagnement de fin de vie nécessite obligatoirement une communauté de vie

vaccination et responsabilité de l’Etat : administration de la preuve

Voici un arrêt intéressant au regard de l’administration de la preuve. Conseil d’État Arrêt du 6 novembre 2013 N° 345696 En l’espèce, Mme A a subi, dans le cadre de l’obligation vaccinale liée à son activité professionnelle, trois injections d’un vaccin anti-hépatite B en octobre et novembre 1992 et en janvier 1993, puis un rappel le 24 novembre 1993. Une sclérose en plaques a été diagnostiquée en septembre 1994, elle a recherché, sur le fondement de l’article L. 3111-9 du code de la santé publique, la responsabilité de l’Etat au titre de cette affection( » Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d’un dommage imputable directement à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre est supportée par l’Etat « ). La difficulté était que le rapport d’expertise, sans l’exclure, n’établissait pas de lien de causalité entre la vaccination et l’affection. La position du Conseil d’Etat est claire malgré ce rapport : « La responsabilité de l’Etat peut être engagée en raison des conséquences dommageables d’injections vaccinales contre l’hépatite B réalisées dans le cadre d’une activité professionnelle eu égard, d’une part, au bref délai ayant séparé l’injection des premiers symptômes d’une sclérose en plaques, éprouvés par l’intéressé et validés par les constatations de l’expertise médicale, et, d’autre part, à la bonne santé de la personne concernée et à l’absence, chez elle, de tous antécédents à cette pathologie antérieurement à sa vaccination ; que la preuve des différentes circonstances à prendre ainsi en compte, notamment celle de la date d’apparition des premiers symptômes d’une sclérose en plaques, peut être apportée par tout moyen » Le tribunal administratif avait pour sa part estimé que seule la production de pièces médicales était susceptible d’établir la date d’apparition de ces symptômes. Ce faisant il avait commis une erreur de droit et son jugement a été

Puis-je être indemnisé par une juridiction répressive si le prévenu sollicite une relaxe ?

La faute pénale peut être complexe concernant les accidents de circulation. En effet, s’agissant des délits non intentionnels, qui n’ont donc pas été délibérément souhaités par la personne poursuivie, il peut arriver que l’accident se soit finalement produit sans qu’aucune faute pénale n’ait été commise. Par exemple : une difficulté totalement imprévisible a perturbé la circulation, le véhicule de la victime qui doit piler se trouve percuter par l’arrière par le véhicule suivant qui pourtant respectait les distances de sécurité et ne roulait pas trop vite. La juridiction pénale peut néanmoins être saisie à la demande du parquet. Il faut donc vous attendre à ce que le prévenu sollicite une relaxe. Dans ce cas, vous devrez solliciter l’application de l’article 470-1 du Code de procédure pénale, lequel dispose : « Le tribunal saisi, à l’initiative du ministère public ou sur renvoi d’une juridiction d’instruction, de poursuites exercées pour une infraction non intentionnelle au sens des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l’article 121-3 du code pénal , et qui prononce une relaxe demeure compétent, sur la demande de la partie civile ou de son assureur formulée avant la clôture des débats, pour accorder, en application des règles du droit civil, réparation de tous les dommages résultant des faits qui ont fondé la poursuite. Toutefois, lorsqu’il apparaît que des tiers responsables doivent être mis en cause, le tribunal renvoie l’affaire, par une décision non susceptible de recours, devant la juridiction civile compétente qui l’examine d’urgence selon une procédure simplifiée déterminée par décret en Conseil d’Etat ». Dans le cas bien précis des infractions non intentionnelles, le tribunal pourra statuer sur votre indemnisation. Ce ne sont pas des dispositions d’ordre public : vous devez expressément viser l’application de l’article 470-1 du Code de procédure pénale en le

Qu’est-ce qu’un sapiteur ?

Au cours d’une instruction, il est fréquent qu’un juge fasse appel à un expert « afin de l’éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise sur une question de fait » qui requiert ses compétences (C. pr. civ., art. 232). Toutefois, lorsque l’expert commis doit recueillir des informations dans une catégorie technique qui n’est pas la sienne, celui-ci fait alors appel à un sapiteur (C. pr. civ., art. 278). Le sapiteur est un spécialiste dans un domaine bien précis qui fournira à l’expert judiciaire les connaissances, qui sont hors de sa compétence. Il intervient uniquement sur un point précis de la mission de l’expert. Exemple : en matière de droit de la construction, en cas de désordres concernant l’isolation phonique, l’expert judiciaire sollicitera l’avis d’un sapîteur acousticien. ■ Code de procédure civile Article 232 « Le juge peut commettre toute personne de son choix pour l’éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise sur une question de fait qui requiert les lumières d’un technicien. » Article 278 « L’expert peut prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne.