Actualités Juridiques

Le préjudice esthétique temporaire : un préjudice à part.

Le préjudice esthétique temporaire doit être indemnisé de manière indépendante et ne doit pas être confondu avec le préjudice du déficit fonctionnel temporaire. La deuxième chambre civile de la Cour de cassation vient de le préciser dans un arrêt récent en date du 4 février 2016 (Cass. civ. 2, 4 février 2016, n° 10-23.378). La Cour d’Appel avait intégré le préjudice esthétique temporaire dans l’indemnisation du déficit fonctionnel temporaire. La victime avait formé un pourvoi en cassation. Pour la Cour de cassation, le préjudice fonctionnel temporaire est destiné à indemniser la gêne dans les actes de la vie courante et en particulier la privation de qualité de vie, et le préjudice esthétique temporaire est destiné à indemniser la rupture de son apparence physique, de sa gestuelle et de sa démarche tant au regard des autres que de la victime elle-même. La Cour d’Appel « a violé l’article 1382 du Code civil, et le principe de l’indemnisation de l’entier préjudice subi par la victime ». Le préjudice esthétique temporaire est bien un poste de préjudice à lui seul, et doit être indemnisé en

Accident médical, quel juge saisir pour la demande d’expertise ?

Faut-il saisir le juge des référés civil ou le juge des référés administratif ? Un accident médical concerne fréquemment le secteur libéral et le secteur public. C’est l’exemple assez classique d’une consultation réalisée en libéral et d’un acte médical effectué ensuite à l’hôpital, en secteur public. —————– Dans cette hypothèse, la victime d’un l’accident médical peut saisir indifféremment le juge des référés civils ou le juge des référés administratifs pour solliciter la désignation d’un expert judiciaire. C’est le Tribunal des conflits qui a ainsi imposé au juge des référés, civil comme administratif, de se déclarer compétent « en l’état où la demande ne tend qu’à voir ordonner une mesure d’instruction avant tout procès et avant même que puisse être déterminée, eu égard aux parties éventuellement appelées en la cause principale, la compétence sur le fond du litige, mais que le fond du litige est de nature à relever, fût-ce pour partie, de la compétence des juridictions de l’ordre auquel il appartient » (décisions du Tribunal des conflits n° 3162 du 5 juillet 1999 et n° 3220 du 23 octobre 2000). Cette solution permet dés lors à la victime, qui ne sait pas forcément à ce stade du dossier vers quel type de responsabilité orienter son action, d’obtenir une mesure d’expertise judiciaire sans difficulté dans le choix de juridiction. Cette mesure pourra par la suite faciliter son choix, en fonction du rapport

Motifs de refus d’audition de l’enfant par le Juge aux affaires familiales

L’article 388-1 du Code civil prévoit les modalités concernant l’audition de l’enfant. Or, cet article précise « cette audition est de droit lorsque le mineur en fait la demande ». Peut-on en déduire que cette audition est réellement toujours effectuée ? ———– Cette demande d’audition est présentée au magistrat par le mineur, mais elle peut l’être également par les parties, et il n’existe aucun  formalisme nécessaire : un simple courrier est suffisant. Il convient par ailleurs de noter que cette demande d’audition peut être formulée à tout instant de la procédure, y compris pour la première fois en cause d’appel. Le juge s’assure que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat. Concernant les motifs de refus d’audition, l’article 338-4 du Code de Procédure Civile dispose « Lorsque la demande est formée par le mineur, le refus d’audition ne peut être fondé que sur son absence de discernement ou sur le fait que la procédure ne le concerne pas. Lorsque la demande est formée par les parties, l’audition peut également être refusée si le juge ne l’estime pas nécessaire à la solution du litige ou si elle lui paraît contraire à l’intérêt de l’enfant mineur. Le mineur et les parties sont avisés du refus par tout moyen. Dans tous les cas, les motifs du refus sont mentionnés dans la décision au fond. » Dans un arrêt récent du 16 décembre 2015, la Cour d’Appel a ainsi rejeté la demande d’audition de l’enfant mineur, précisant que « la cour dispose en l’espèce de suffisamment d’éléments pour statuer sans qu’il soit nécessaire de procéder à l’audition d’Anaïs qui, âgée de seulement 7 ans, doit être le plus possible préservée du conflit parental dont elle a déjà subi personnellement les conséquences » (Cour de cassation chambre civile 1, arrêt du 16 décembre 2015, N° de pourvoi: 15-10442). -> Notons toutefois que l’âge de l’enfant ne constitue pas à lui seul un motif pour écarter l’audition ! Dans un arrêt du 18 mars 2015, la Cour de cassation a ainsi infirmé un arrêt de Cour d’Appel qui, pour rejeter la demande d’audition présentée par l’enfant, retenait que ce dernier n’était âgé que de neuf ans et n’était donc pas capable de discernement. « En se déterminant ainsi, en se bornant à se référer à l’âge du mineur, sans expliquer en quoi celui-ci n’était pas capable de discernement, et par un motif impropre à justifier le refus d’audition, la cour d’appel a privé sa décision de base légale » (Cour de cassation, 1ère chambre civile arrêt du 18 mars 2015

Barème de capitalisation et appréciation souveraine des juges du fond

La Cour de cassation vient de rappeler la possibilité pour les juges du fond d’opter pour le barème de capitalisation de leur choix, dès lors que ce dernier semble le plus adapté à assurer les modalités de la réparation, pour le futur, d’un dommage actuel et certain. Telle est la solution énoncée par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 10 décembre 2015 ( Cass. civ. 2, 10 décembre 2015, n° 14-27.243 ). En l’espèce, pour lui permettre d’indemniser les préjudices patrimoniaux futurs de la victime, la Cour d’Appel avait fait « application du barème de capitalisation publié en mars 2013 par la Gazette du Palais qui s’appuie sur les données démographiques les plus récemment publiées 2006-2008, et sur une appréciation de la conjoncture économique la plus proche de la réalité avec un taux d’intérêt de 1,20 % ». L’assureur critiquait l’application le choix d’un tel barème et formait un pourvoi en cassation. Il indiquait notamment que le taux d’intérêt de 1,20 % prenait en considération un taux d’inflation totalement hypothétique La Cour a rejeté le pourvoi et rappelé le pouvoir souverain et leur liberté dans le choix du

Evaluation de l’indemnisation du préjudice d’accompagnement : position du Conseil d’Etat.

Il avait déjà été question dans le présent blog de la délicate question du préjudice d’accompagnement. Ce préjudice a pour vocation à réparer le préjudice subi par les proches d’une victime, dont les conditions de vie sont perturbées en raison de leur présence aux côtés de la victime. Dans une toute récente décision, le Conseil d’Etat (CE 10 décembre 2015, n° 374038) a également pu préciser le mode d’évaluation de ce préjudice. Dans cette affaire, une patiente avait subi lors d’une intervention chirurgicale une grave embolie gazeuse, laquelle avait eu de lourdes conséquences sur le plan neurologique. La responsabilité de l’hôpital était recherchée. L’époux n’avait pas été indemnisé pour son préjudice d’accompagnement. La victime et son époux avait donc interjeté appel de la décision. La Cour d’Appel avait alloué une somme de 10.000 euros à l’époux au titre de son  » préjudice d’accompagnement « , préjudice qui était distinct des frais d’assistance d’une tierce personne. Le Conseil d’Etat a donc eu l’occasion de préciser que : « contrairement à ce que soutient l’AP-HP, la cour administrative d’appel n’a pas commis d’erreur de droit en estimant que les troubles subis de ce fait par M. A…présentaient le caractère d’un préjudice propre lui ouvrant droit à réparation et en lui accordant à ce titre une indemnité qui ne fait pas double emploi avec la somme allouée à son épouse pour la mettre en mesure d’assumer, à l’avenir, les frais afférents à l’assistance par une tierce personne ; qu’eu égard à la nature du préjudice subi par M. A…du fait de l’aide apportée à son épouse, la cour n’a pas davantage commis d’erreur de droit en évaluant de manière forfaitaire ce préjudice, qu’elle a qualifié de  » préjudice d’accompagnement « , sans se référer au montant du salaire minimum augmenté des charges sociales ». Le Conseil d’Etat précise ainsi que ce préjudice a une existence propre, indépendante de tous les autres postes de préjudices, et peut être évalué de manière

Divorce : la tentative de conciliation des époux est une formalité substantielle et ne peut être implicite.

En préalable à la procédure de divorce, la tentative de conciliation est obligatoire. L’article 252 du Code civil précise « Une tentative de conciliation est obligatoire avant l’instance judiciaire. Elle peut être renouvelée pendant l’instance. Le juge cherche à concilier les époux tant sur le principe du divorce que sur ses conséquences. »  La 1ère chambre civile de la Cour de cassation le rappelle dans un arrêt en date du 16 décembre 2015. Elle précise que  les dispositions relatives à la procédure de divorce sont d’ordre public et que la tentative de conciliation, constitue notamment une formalité substantielle (Cass. civ. 1, 16 décembre 2015, n° 14-28296).  Dans cette affaire, une requête en divorce avait déposé devant un juge New-Yorkais, puis une même requête en divorce avait été quelques mois après été déposée devant un juge aux affaires familiales français. L’épouse avait conclu à l’irrecevabilité de cette deuxième requête excipant qu’un jugement de de divorce avait été prononcé en février 2013 par le juge américain. Les juges du fond et par suite la Cour d’Appel avait déclaré contraire à l’ordre public international français de fond le jugement du 27 février 2013 prononcé par le tribunal des affaires matrimoniales de New York.  La Cour d’Appel de Bordeaux avait, dans ce contexte, cru devoir considérer (bien qu’aucune audience de tentative de conciliation ne soit intervenue) que le contexte excluait qu’une réconciliation puisse intervenir, et constatait une non-conciliation « implicite ». L’arrêt de la Cour d’Appel est immanquablement censuré par la Cour de